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REVUE

BRITANNIQUE

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PARIS. •— TTP. HÈNNDTftR, llUB DO BOOLBYAftD 0t8 BATIGNOLLES, 7.

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REVUE

BRITANNIQUE

REVUE INTERNATIONALE

CHOIX D'ARTICLES

extraits des meilleurs écrits périodiques

DE LA fiRAIDE-BRETAGIE ET DE L'AIÉRIQUE

comiri par des ARTiaBs orkinaux sous LA DIRECTION DE M. AMÉDÉE PiCIIOT.

ANNÉE 1860.— HUITIÈME SÉRIE.

PARIS

AD BUREAU DE LA REVUE, RUE NEUVE-SAINT-AUGUSTIN , 60.

BOTTERDAM | KADBTD

CHEZ M. KRAMERS^ CHEZ BAI LLY-BAIIXI ÈRE,

Ubnire-fidUeor. I Libraire de Leurf Majestés.

VOUVELLCOBLÈANS, A LA LIBRAIRIE NOUVELLE.

1860

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JANVIER 1860.

REYUE

BRITANNIQUE

MÉTÉ0R0L08IL ABRONOMIE.

LA PLUIE.

Pas d'eau, pas de plantes. Pas de plantes, pas d'animaux. Pas d'animaux, pas d'hommes.

La bonne irrigation de la terre est un point d'une importance TÎtale dans les arrangements de la création. Le mécanisme mys^ térieux au moyen duquel elle s'accomplit est compliqué ; mais, si on le considère comme un vaste appareil destiné à pomper Teau et à arroser la surface de notre planète, il est impossible de concevoir un système à la fois plus heureusement combiné et plus efficace.

Qu'on nou^[>ermette une supposition toute gratuite. Dans l'intérieur d'un continent quelconque, tout juste à l'endroit où, faute de véritables données topographiques, un géographe ancien eût, selon l'usage, planté un éléphant avec sa tour, est située une ferme qui, fort éloignée de tout lac ou rivière, n'est que très-par- cimonieusement approvisionnée d'eau par des sources ou des puits. Il n'est pas tombé la moindre averse depuis plusieurs an*

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6 R£VU£ BRITANNIQUE.

nées. Comment le pauvre propriétaire pourra-t-il entretenir son domaine en bon état de culture? A en juger par la prédisposi- tion au mécontentement particulière aux agriculteurs (ne les entend-on pas constamment se plaindre des rigueurs météoro- logiques et se répandre en récriminations contre le ciel?), notre fermier pousserait sans doute les hauts cris et pourrait bien, en désespoir de cause, abandonner sa malheureuse exploitation. Creuser un long canal pour amener l'eau de la rivière la plus voisinp, et ensuite, afin d'utiliser convenablement cette eau, sillonner ses champs d'une interminable série de petites ri- goles, serait un travail aussi ardu que de tentçr de labourer avec des lames de canif toutes les terres arables de la Grande- Bretagne, ou de moissonner avec des ciseaux la récolte de blé de tout un royaume. Quant à irriguer ses arpents au moyen de tonneaux et de tuyaux d'arrosage, y songer serait simplement folie. Nous observions naguère , dans une coquette ville de bains, un homme occupé à arroser une vaste promenade afin d'abattre la poussière. Il se servait à cet effet d'une pompe rou- lante qu'un bras de levier faisait agir et qui s'alimentait à un tonneau plein d'eau. L'appareil une fois en position, le digne préposé de la salubrité publique promenait lentement le jet à droite et à gauche, et, après avoir ainsi humidifié une certaine étendue du sol, il transportait sa machine un peu plus loin, continuant de la sorte jusqu'à ce qu'un glouglou particulier du tuyau lui eût annoncé que le réservoir tirait à sa fin . Ce moment critique arrivé, notre homme cessait de pomper, et, traînant après lui son appareil, il allait renouveler sa provision d'eau à une citerne, pour venir reprendre son aspersion à l'endroit il Ta- vait laissée. Cette parodie de pluie ressemblait aussi peu à une pluie véritable que le bruit de la classique feuille de tôle du théâtre ressemble peu au retentissant et solennel fracas du ton- nerre. Ajoutez que, pendant le temps que metIKt l'arroseur à mouiller un coin de la promenade, le coin qu'il venait de quit- ter était déjà à moitié sec, sans compter les longues traînées poudreuses que le jet n'avait pas atteintes. En somme, le beau Brummel, d'élégante mémoire, qui prétendait un jour s'être enrhumé au contact momentané d'un personnage d'une réserve glaciale, aurait pu bivouaquer sur la promenade en question

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sant^ GQUfÎF le risque de gagner Iq moindre rhumatisiod. A lia? ailler ainsi , nous prtmes-nous è penser, les habitants de rSurope tout entière auraient beau so faire arroseurs, o est tout au plus s'ils arriveraient à imbiber oonyenableoient pour la cul- toie une étendue de territoire grande eomme un comté d'Àn-r gleterre ou un département français.

Par bonheur, la nature épargne toute cette peine à nos bras. Tandis que le propriétaire de notre ferme imaginaire se creuse la cervelle à chercher le moyen de se procurer le liquide fécon^ dant, cette excellente nature travaille i le lui donner gratuite- ment et en abondance. Biqn loin, *-^ disons, si Ton veut, à des miniers de lieues, une vapeur précieuse s'élàve de quelque giand réservoir d'eau ou de quelque vaste contrée humide et se tient en suspension dans les airs. L'eau est l'élément vital du monde. Son incessante circulation n'est pas moins nécessaire à l'existence de notre globe que ne le sont à la santé de Thomme les ruisseaux de sang qui courent dans nos veines. Mais comme cette eau cherche toigours son niveau et qu'elle le trouve dans rOcéan, comment se fait-il qu^elle soit ramenée et répandue de nouveau sur les hauts plateau^, et même reportée jusque sur le sommet des montagnes? Gomment parvient-elle aussi ^ se dé- tuiasser des sels et des autres éléments étrangers dont elle a pu se charger dans le sol , ou qu'elle a pu rencontrer dans le sein de la mer, pour reprendre ensuite ses fonctions, pure et exempte de tout mélange, de toute souillure?

Le merveilleux phénomène de l'évaporation est le premier qui saccomplisseàl'avantagedu cultivateur. L'eau étant un liquide d'une pesanteur considérable, puisqu'elle pèse 860 fois plus <iae Tair une température de 15 degrés centigrades au ni- veau de la mer), il faut qu'elle subisse une transformation qui la rende transportable à travers l'atmosphère. C'est ce qui a lieu par sa conveiiion en vapeur au moyen de la chaleur. On a, dans le fait, qualifié TOcéan de grand alambic, et l'on peut regarder le soleil comme le grand distillateur. Mais'parce que l'eau, mise dans une casserole sur le feu, ne passe pas à l'état de vapeur proprement dite avant d'avoir atteint une température de 100 degrés, il ne faut pas croire qu'elle ne se volatilise pas à tous les degrés inférieurs de l'échelle thermométrique. Au con-

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g REVUE BRITANNIQUE.

traire, elle fournit de la vapeur à tous les degrés, bien que plus lentement et en moins grande quantité. La neige, la glace môme s'évaporent dans une atmosphère dont la fraîcheur est au-dessous du point de congélation; Boyle a, en effet, trouvé qu'un glaçon pesant 2 onces le soir avait perdu 10 grains le lendemain matin; et Howard a constaté qu'une boule de neige, de 5 pouces de diamètres, avait diminué de 150 grains, la valeur de mille gallons par acre, dans l'espace d'une seule nuit du mois de janvier.

Il va sans dire que les grandes nappes d'eau dont le globe est couvert sont les réservoirs d'où provient originairement la vapeur nécessaire à la terre. Le docteur Halley a calculé que la quantité de vapeur fournie par la mer Méditerranée seule, dans les douze heures d'une journée d'été, n'était pas moindre de 5,280 millions de quintaux; celle qui s'exhale de la terre doit nécessairement varier selon l'humidité et la température du lieu ; mais d'après des expériences faites dans des circonstances diffé- rentes , le docteur Watson a observé qu'un acre de terre en An- gleterre produisait de 2,000 à 3,000 gallons de vapeurs en 12 heures. Dans les pays chauds, après que le sol a été rafraîchi par les pluies, les émanations doivent naturellement être beau- coup plus abondantes. Et non-seulement la terre transpire de la sorte abondamment, mais il ne faut pas oublier que les vé- gétaux, aussi bien que les animaux, dégagent constamment leur moiteur dans l'atmosphère. Les plantes engendrent beaucoup d'humidité. On voit quelquefois la matière aqueuse qui exsude par leurs pores pendre en gouttelettes aux extrémités de leurs feuilles, au point qu'on pourrait la prendre pour une rosée. La proportion de leur exsudation doit aussi dépendre de la cha- leur et de l'humidité de lair ; mais le docteur Haies trouva que des choux sur lesquels il avait expérimenté avaient dégagé 1 li- vre 3 onces de vapeur durant le jour, alors que des hélian- thes, qui sont des agents de transpiration bien plus actifs encore, en dégageaient 1 livre 4 onces dans le même temps. Ce phéno- mène se manifeste aussi à un très-haut degré chez les hommes, -— nous n'osons pas dire chez les dames. Il ne se dégage pas moins de 2 livres d'eau par jour de la peau et des poumons de la plupart des individus ; et si une personne, par excès de

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ehaieur et d'exercice, vient à tomber dans un état de déli- quescence particulier, elle peut, dans les 24 heures, charger l'atmosphère de 5 livres de liquide. Si Tœil pouvait tout sai- sir, chacun de nous paraîtrait enveloppé d'un petit nuage. Je me rappelle, dit Watson, que m'étant un jour échauffé beaucoup en montant les échelles pour sortir du fond de la mine de cuivre d'Ecton, je remarquai, à la lueur d'une bou- gie, une vapeur épaisse qui s'exhalait en fumée de mon corps, et qui était visible autour de moi à la distance d'un pied et même plus. > Et voyez combien est merveilleux le procédé diimique de la nature : ces mêmes émanations, transpiration de la mer et de la terre, des plantes, des animaux et de l'homme, ne tardent pas à retomber sur le sol en tendre rosée, en pluie fécondante, ou à reparaître sous la forme du limpide filet d'eau de la fontaine tapissée de mousse. En évaluant à 35 pouces la moyenne de l'évaporation annuelle qui s'effectue sur toute la surface du globe, on a calculé que la quantité totale d'eau ré- pandue dans l'air chaque année remplirait un réservoir d'une capacité de 94,450 milles cubes. Toutefois ce calcul, fondé sur les données de Dalton, n'est certainement pas assez élevé, car on évalue maintenant à 5 pieds la quantité moyenne de pluie que les nuages versent sur toute la terre, dans Tespace d'une année.

Mais, en second lieu, le simple fait de l'ascension et de la chute de ces exhalaisons humides, à l'endroit elles ont été produites, serait sans utilité pour l'impatient cultivateur de notre invention. Il faut pour lui que les molécules aqueuses soient pour ainsi dire apportées de la mer à sa porte. C'est justement Foffice que remplissent les vents. Le navire qui prend sa car- gaison dans un port étranger, le convoi de chemin de fer qui part avec son bagage, le tonneau roulant qui revient plein de la rivière, ne sont pas plus exacts à se rendre à leur destination que le courant d'air qui, après s'être chargé de vapeurs au vaste réservoir de l'Océan, va déposer son fardeau précieux au sein d'un continent altéré. Certains vents, comme le Harmattan du désert, semblent ne souffler que pour dessécher et détruire. Os pompent avidement toute l'humidité qu'ils peuvent arracher de la tene, fanent le feuiUage des plantes au point de le ré-

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10 REVUE BElTANlflQUE.

duire en poussière, fendent les portes et les meubles, et îé* duisent le corps de rhomme à Tétat de momie. Mais lesventflT qui soufflent de la mer nous arrivent chargés d'une abondante et bienfaisante humidité; c'est ainsi que ceux qui viennent du sud-ouest et du nord visiter les côtes occidentales et septen- trionales de TEurope, en apportant avec eux la pluie, apportent en même temps la fertilité sur cette partie du moade.

En troisième lieu, cependant, une masse de vapeur flottant dans Tair, à la hauteur de 4 à 5 milles, rendrait à notre lointain cultivateur aussi peu de service qu'à un bijoutier une mine de diamants dans la lune. Comment voulez-vous qu'il la fasse descendre du ciel? Or, la quantité d'eau qui peut se soutenir en l'air, sous [une forme élastique, invisible, est proportionnée à la température. Plus le thermomètre est élevé, plus Tagglo- mération de vapeur doit être considérable. Envisageant comme une enveloppe distincte l'atmosphère humide qui entoure le globe, on en peut exprimer la pression par des pouces mercu- riels, c^est-à^dire par la quantité de mercure qu'elle peut sup- porter dans un tube de baromètre. Si nos mers avaient toutes la température du point d'ébullition de l'eau (100 degrés), la vapeur qu'elles produiraient serait en équilibre avec une colonne de 30 pouces environ ; mais à 36 degrés, et la température de TO- céan dans les régions équatoriales ne monte jamais beaucoup au-dessus de ce chiffre , la dose de vapeur que peut porter Pair ne suffit pas à équilibrer plus de 1 pouce. A 21 degrés elle est égale à 3/4 de pouce; à 15 degrés à 1/3 pouce; et à 4 degrés à 1/4 de pouce. Donc , si un courant d'air chauffé à 26 degrés eipportait à son point de départ une pleine provision de vapeur, et venait à perdre environ 5 degrés de calorique, il faudrait qu'il abandonn&t un quart de sa charge, ou la moitié s'il en perdait 11 degrés. Son tonnage, qu'on nous permette le mot, diminue à mesure que diminue la chaleur : la vapeur qui s'en détache alors peut prendre une forme visible, et, si elle est suffisamment condensée, elle peut tomber en pluie sur la terre. En effet, toutes les fois qu'un courant humide rencontre un cou- rant d'air plus froid , ou pénètre dans une région du ciel plus glacée, toutes les fois que l'atmosphère est trop chargée d'hu- midité pour supporter un surcroît de vapeur, l'excédant est re^

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LA PLUIE. 11

jeté et deçoeod vers nous sous les {ormes visibles de brume, de brouillard, de nuage, de rosée, de pluie,, de grêle ou de neige. Mais, en quatrième lieu, quand de la vapeur ainsi transportée d'une mer éloignée s'est de nouveau transformée en eau, il est nécessaire qu'une très-grande prudence en dirige le déverse* ment. Un nuage est un vaste réservoir contenant des milliers de tonneaux de liquide. Or, il est clair que si tout ce liquide était lâché à la fois, il causerait un grave préjudice à la végétation sur laquelle il tomberait, et ruinerait probablement le cultiva- teur, n n'est pas de récoltes qui résisteraient à un pareil déluge local. Les plantes seraient tout d-un coup couchées sur le sol ; les feuilles seraient arrachées aux arbres, et d'une fbrét il ne resterait plus que des perches nues qui la feraient ressemblera un navire diSsemparé par la tempête. Le sol même serait défoncé et entraîné par la violence du torrent jusque dans la rivière la plus voisine. Dans les villes, l'approche d'un nuage serait aussi redouté qu'en rase campagne. Les habitants n'auraient plus qu'à se réfugier au plus vite dans leurs maisons ; car, en pareil cas, les parapluies, fussent-ils de tôle, ne prêteraient qu'un abri fort précaire. Il y a d'ailleurs plus d'un exemple de palamités de cette espèce ; mais ce qui, heureusement, n'est que l'excep- tion deviendrait la règle, si la décharge d'un nuage n'était pas mesurée avec la plus scrupuleuse précision . En 1 7 1 8 , une trombe ravagea une lande dans le voisinage de Colne (Lancashire) et, labourant le sol jusqu'au roc vif, à une profondeur de sept à huit pieds, y creusa un vaste gouffre, sur une étendue de plus d'un quart de mille, et emporta une dizaine d'arpents de terre. « La première brèche par laquelle l'eau s'était précipitée, dit le docteur Richardson, avait environ 60 pieds d'ouverture. De chaque côté du gouffre, le sol était tellement bouleversé qu'on voyait à plus de 30 pieds de distance d'énormes crevasses qile quelques jours après les bergers étaient occupés à combler, de peur que leurs moutons ne tombassent dedans. Un phénomène atmosphérique bien plus fréquent encore, c'est la grêle; et sur certains points du globe, notamment dans le midi de la France, c'est un fléau terrible. Des grêlons, pesant quelquefois jusqu'à une demi*livre, souvent si denses et si résistants qu'ils rebon- dissent sur le pavé, pieu vent sur la terre, oii ils détruisent la

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vigne, broient le blé, brisent les branches des arbres, tuent volailles, agneaux, chiens, gros gibier même, et, au besoin, rompent les os aux gens. Dans une tempête de grêle qui s'abatitt sur Offley, en 1767, un jeune homme fut tué par les grêlons : il avaiteuun œil crevé et le corps tout meurtri. En 1788, un orage traversa la France, presque d'un bout à l'autre, laissant partout sur son passage des grêlons énormes , transformant les champs en marécages, renversant les arbres fruitiers, et, dans l'espace d'une heure, changeant la campagne en désert véritable. Le l**" août 1846, la capitale de l'Angleterre fut littéralement bombardée par la grêle. Le fracas occasionné par les fenêtres et les vitrages était effrayant. Il y eut 7,000 carreaux de brisés au palais du Parlement, un plus grand nombre encore à la manufacture de Broadwood et à d'autres grandes usines; enfin dans quelques rues c'est à peine s'il resta une seule vitre intacte. Nos grêlons d'Eu- rope ne sauraient toutefois être comparés à la formidable mi- traille que de temps à autre le ciel lance sur les campagnes de l'Inde. En 1855, le docteur Buist lut à l'Association Britannique un mémoire dans lequel il rendait compte d'une certaine variété d'orages particuliers à THindoustan : dans quelques cas , des grêlons gros comme des citrouilles, et dans d'autres des blocs de dimensions encore plus énormes avaient été précipités sur le sol ou avaient défoncé les toits comme des boulets de canon. Non- seulement il y avait eu des bœufs abattus et des hommes bles- sés grièvement; mais, le 12 mai 1853, 84 personnes et 3,000 animaux de bétail avaient été tués dans ud ouragan accompa- gné de grêle dans les monts Himalaya, au nord de Peshawar. Heureusement, ce sont des événements exceptionnels. Tout avantageux qu'ils peuvent être pour les vitriers, ils ne sauraient manquer d'être excessivement désagréables pour les proprié- taires de fermes et de maisons. Le procédé au moyen duquel le contenu d'un nuage ordinaire se répand sur le sol est bien moins brusque et bien plus bénin. Au lieu de descendre en nappe, l'eau découle doucement, à travers l'air, eq gouttelettes d'un quart de pouce de diamètre chacune , comme si elle passait par un tamis. Le liquide est pour ainsi dire réduit en poussière, afin qu il puisse se répandre sur une vaste étendue et tomber sans froisser une seule feuille, sans abattre un seul brin d'herbe. Le

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LA PLUIE. 13

trarail, commencé doucement, se continue de même, à mesure que le nuage se transporte lentement d'un champ à un autre» arrosant chaque pouce de terrain, mouillant chaque plante, de- puis le stérile chardon jusqu'au chêne majestueux. Pareil mode d irrigation n'est-il pas fait pour plonger en extase quiconque, doué d'une intelligence suffisante pour comprendre les besoins du sol, et d'assez d'expérience pour apprécier la difficulté d'y faire face à l'aide de moyens artificiels, observerait pour la pre- mière fois de sa vie le déchargement d'un de ces navires aériens ?

Hais, quel que fût le plaisir que lui causftt cet approvision- nement d'eau tout particulier, notre cultivateur imaginaire re- prendrait sans doute bien vite ses jérémiades habituelles, s'il n'avait l'assurance de voir de nouveaux nuages se former et se déverser périodiquement à son profit. Il y a des contrées tropi- cales où il ne pleut jamais, et d'autres il ne pleut que rare- ment. Sar la terre des Pharaons et dans certaines parties du pays da Prophète, une ondée est un phénomène presque aussi curieux que l'est pour nous une trombe ou la chute d'un aérolithe. Au Pé- rou, le parapluie est un meuble inutile ; à peine a-t-on deux ou trois fois dans la vie l'occasion de s'en servir. Lorsque laserenidad perpétua de ce pays fut troublée par des pluies au commence- ment du dix-huitième siècle, cet événement incommoda si fort la population, qu'une épidémie se déclara dans son sein ; et en 1790, lorsqu'une simple averse tomba sur la ville de Lem- beyeque, elle renversa plusieurs maisons ; il est vrai qu'on bâtit li tellement à la légère, qu'un ouragan de grêle, comme ceux qui désolent la France ou les Indes, réduirait toute une ville en poussière en un tour de main.

Il y a eu aussi dans diverses parties du globe des sécheresses très-proloDgées. Du temps d'Achab, la terre d'Israël demeura fort longtemps sèche, par suite des invocations d'Elisée ; car celui-ci « pria pour qu'il ne plût point, et il ne plut point sur la terre durant trois ans et six mois. » De 1827 à 1830, une grande sécheresse a régné dans les Pampas. Pendant ce grau vco (au dire de sir F. Head), toute la végétation a manqué; la campagne avait l'aspect d'une grande route poudreuse ; le sol avait été tellement bouleversé, que les marques qui indiquaient les limites des propriétés étaient disparues, et qu'il s'ensuivit

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14 REVUE BntTAlYNlQUE.

de nombreuses contestations entre les riverains. Les béstiatii périssaient de toutes parts faute d'eau et de nourriture ; un propriétaire de San-Pedro perdit à lui seul 20,000 têtes de bé- tail, et la multitude des animaux qui se ruèrent sur le Parana fut si considérable, qu'il en mourut plusieurs centaines de mille, soit engloutis dans les eaux, soit pour avoir bu à Texcès, soit pour n'avoir pu se dépêtrer de la bourbe qui encombrait les bords du fleuve.

Cependant, à part ces cas locaux ou transitoires, notre culti- vateur pourrait reconnaître que la nature a réglé l'irrigation de la terre selon les exigences du climat et de la position géogra- phique. En principe général, la quantité de pluie augmentée mesure que l'on s'avance des pôles vers l'équateur. Dans les contrées oii le soleil est l'agent principal de l'évaporation, oti doit s'attendre à ce qu'une averse ne soit pas Une petite affaire. « Un nuage tout noir^ qui s'était formé subitement» dit H. Bur- chell, déversa son contenu sur nous en un instant, peut-être en moins d'une minute, inondant tout avec l'impétuosité d'un torrent. La terre, auparavant brûlée» fut, dans le court espace de cinq minutes, couverte de véritables étangs. La meilleure description qu'on puisse donner de quelques-unes de ces pluies tropicales, c'est de leur appliquer celle que, dans ^bn langage pittoresque, un paysan faisait à M. Rowell d'un orage survenu en Angleterre. « Les nuAges, disait cet homme, paraissaient si près de la terre qu'à peine si l'on aurait pu passer dessous : il ne tomba pas de pluie» le nuage s'abattittout d'une pièce sur le sol. » On serait vraiment tenté de croire que ïûhleborn, le génie aquatique du célèbre roman é'Ondine, de La Motte- Fouqué, s'est tnis en route avec des intentions tout à fait dilu- viennes, si ces soudaines explosions de nuages n'étaient pas ordinairement d'aussi courte durée qu'elles s'opèrent avec violence.

Une autre loi générale en hygrométrie, c'est que la chute de la pluie décroît à mesure ique l'on quitte les plages d'un continent ponr s'enfoncer dans l'intérieur; cela provient de ce qu'on s'éloigne continuellement de la grande source de la va- peur. Par la même raison, les cAtes occidentales de la Grande- Bretagne reçoivent des aspersions plus abondantes que les côtes

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PLUIE. 16

orientâtes. L'immense océan Atlantique produit, en effet, une plus grande quantité de yapeur que la mesquine mer d'Allema- gne. A North-^hields» il tombe une quantité moyenne de 25 pou- ces d'eau par an; à Caniston, sur la rire opposée^ bien que presque sous la même latitude, la moyenne annuelle est de 85 pouces, ou plus de trois fois autant. Les pluies qui tombent annuellement du ciel dans la moitié orientale de Orande^Bre- tagne atteignent uti niteau de 27 pouces, tandis que, dans l'autre moitié du royaume, elles sont évaluées à 50 ou 55 poiraes*

Dans les pays de montagnes, la quatitité d'humidité ta crois- sant, àmesure qu'on s'élève de la plaine au sommet des monts. La cause de ce phénomène a été le sujet de discussions nom- breuses. Les uns attribuent ce résultat à la température peu élevée des collines ; d'autres le colisidèrent comtne tine consé- quence mécanique de la concentration des vapeurs; mais M. RoweU semble regarder les grands pics rocheux Comme de grands paratonnerres qui déponilleUt les nilages de leur élec- tricité et forcent les globules aqueux à descendre, en les privant de l'élément qui leur sert de soutien. Quoi qu'il en soit, les brouillards qui enveloppent la ciitié des montagnes sont des phénomènes qui se reproduisent journellement, et l'état humide des endroits rocailleux a été constaté par un grand nombre d'observations. Ainsi, dans Tannée 1845, tàtldis que les nuages versaient environ 20 pouces d'eau à Durham, 25 à Leeds, 31 à Carlisle et 34 à Liverpool, la quantité de pluie tombée dans les montagnes du district des Lacs s'élevait à 87 pouces pour But- termere, à 109 pour Wastdale-Head, à 121 pour Grasmere, et à 151 pour Seathwaite en Borrowdale. Ce dernier canton avait donc reçu une aspersion sept ou huit foiâ aussi abondante que l'antique ville de Saint-Cuthbert, si renommée pour sa moutarde et ses vieilles filles. Ces pluies excessives, qui visitent la Grande- Bretagne, sont encore bien inférleutes aut dverses torrentielles qai inondent l'Hindoustad. Le colonel Sykes rapporte qu'à Malcolmpait, sur les hauteurs de Mahabuleshwar, la quantité de pluie déversée annuellement par l'atmosphère est de 302 pouces, et qu'à Cherraponjee, dans les montagnes de Cossya, elle s'éle- vait, en 1851, au chiffre surprenant de610 pouces, ou 50 pieds

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16 REVUE BRITANNIQUE.

10 pouces l Autre fait singulier : il suffit quelquefois d'une lé- gère différence dans la localité pour produire une grande diffé* rence dans Thumidité. Il y a, à un mille et demi environ du lac Ennersdale, une ferme» sur l'étendue de laquelle il ne tombe que moitié autant de pluie que dans le lac même. Les forêts con- tribuent aussi à absorber la moiteur de Tair ; en efiet, toutes les fois qu'on a abattu en partie ou en totalité de ^ands bois, comme jadis à Marseille *, il s'en est suivi une décroissance remar-

^ Voir, dans la Pharsale, la description de l'antique forêt de Maneille, dont il ne reste pas un seul arbre. C'est un des passages du poëme de Lucain que M. Bignan a traduits avec le plus de bonheur. (Note du Directeur,)

Une forêt, séjoar respecté par les âges, S'élevait, dans les airs répandant ses ombrages Et de vastes rameaux mêlés de toute part Opposant au soleil un sombre et froid rempart. ne se trouvaient pas les Nymphes des montagnes. Ni les Sylvains des bois, ni les Pans des campagnes. Hais des rites sanglants, d'implacables autels, - El des arbres sacrés du meurtre des mortels. Si ce passé, crédule aux prodiges célestes, Mérite notre foi^ sur ces arbres funestes L'oiseau craint de s'abattre^ et dans l'épais taillis Les monstres des forêts ne cherchent point leurs lits. La foudre qui jaillit du flanc noir des nuages Jamais avec les vents n'y roule les orages ; Du souffle aérien le feuillage frustré De son horreur native y reste pénétré. Partout l'onde du sein des sources ténébrenses Tombe, et des anciens Dieux les images nombreuses, Dans leur morne tristesse et sans forme et sans art. Sur des troncs mutilés surgissent au hasard. L'œil s'effraye étonné de ces pftles figures Que la rouille des ans chargea de flétrissures. Une idole connue inspire moins d'horreur^ Tant l'aveugle ignorance ajoute à la terreur I Le bruit court que souvent on entend, 6 mystère ! Les cavernes mugir en ébranlant la terre; L'if courbé se redresse encor plus menaçant; La forêt, sans brûler, d'un feu resplendissant S'éclaire, et des replis de leurs mobiles chaînes D'innombrables dragons embrassent les vieux chênes. Loin d'aborder jamais des autels odieux. Le peuple épouvanté les abandonne aux Dieux. Lorsque Phébus atteint la moitié de sa route, Ou quand la nuit des cieux enveloppe la voftte,

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LA PLUIE. 17

quable dans Thumidité da pays. Un phénomène non moins intéressant, et qui pourra paraître paradoxal à beaucoup de gens, c'est que la pluie semble augmenter en quantité à mesure qu'elle approche de la terre; de sorte que, si Ton plaçait une série de pluviomètres à différentes hauteurs, comme sur les échelons d'une échelle, le pluviomètre placé le plus bas présen- terait une pression plus grande que celui qui serait placé le plus haut. En effet, il pleut généralement davantage au pied d'une tour qu'à son sommet. Et la différence n'est pas insigni- fiante ; car, tandis qu'un des pluviomètres du docteur Heberden placé sur le toit de l'abbaye de Westminster indiquait qu'il était

De ces profonds réduits le prêtre pâlissant

S'éloigne et n'ose voir leur maître tout-puissant..

César pourtant désigne aux coups de la cognée

La forêt qui, d'abord par la guerre épargnée.

Se dressait près du camp et dominait en paix

La nudité des monts de ses rameaux épais.

Mais des brates soldats la main tremble elle-même;

De cet asiie saint la majesté suprême

Les arrête; en frappant ces troncs religieux,

Ils craindraient que le fer ne retombât sur eux.

Dès que César a vu ses vaillantes cohortes

Sabir de la terreur les étreintes si fortes.

D'une bâche intrépide il s'arme le premier^

Dans les airs la balance, aux flancs d'un chêne altier

La plonge, et leur montrant l'audacieuse empreinte :

« Frappez cette forêt et frappez- la sans crainte,

« Je prends sur moi le crime. » Il commande. A ces mots,

La foule, obéissant aux ordres du héros,

Sans adjurer la peur, mais sans vouloir déplaire.

Des Dieux et de César a pesé la colère.

L'yeuse au tronc noueux tombe avec les ormeaux ;

Puis, l'arbre de Dodooe et l'aune, ami des eaux,

Le cyprès, ornement des nobles sépultures.

Pour la première fois perdant leurs chevelures,

D'un feuillage touflu dépouillés sans retour,

Accordent un passage k la clarté du jour.

La forêt tout entière, à tant de coups en butte,

S'ébranle, mais sa masse a soutenu sa chute.

A cet aspect, tandis que le Gaulois gémit.

De joie en ses remparts la jeunesse frémit.

Qui croirait, en effet, que les Dieux sans défense

Souffrent qu'impunément la terre les offense?

liais le Destin sauva des criminels nombreux.

Le ciel n'a de courroux qu'envers les malheureux.

8* SÊaiB. TOMB I.

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18 REYUE BRITANNIQUE.

tombé \ir^^,Q99 d'eau, un autre, placé à la base de Tédifice, signalait 22i^'^,608, ou près de deux fois autant.

Des ei^périenoes du même genre ont été faites h la cathédrale d'York par le professeur Phillips et M. Grey, qui ont con- staté une effusion pluvieuse de 14^***, 903 à la hauteur de 212 pieds, tandis qu'ils ont trouvé 25««'"^,7Û6 d'eau dans un pluviomètre posé sur le sol. Ainsi une différence de 70 mètres dans l'élévation des lieux causait une différence de 70 pour 100 dans la quantité de pluie tombée. Pour expliquer ce phéno- mène curieux , on suppose généralement que les gouttes , qui sont excessivement petites au commencement de leur chute, se grossissent par la condensation de la vapeur, ou qu'elles ramassent de l'humidité à mesure qu'elles passent par les couches humides qu'elles ont nécessairement à traverser. Il faut toutefois observer que, dans un pays, la quantité de pluie qui tombe peut être considérable, bien que le nombre des jours pluvieux y soit relativement restreint. Entre les tropiques, les nuages sont en quelque sorte prodigues de leurs effusions, il y a des saisons régulières de sécheresse durant lesquelles les indigènes ne sauraient raisonnablement compter sur la moin- dre pluie ; mais dans des zones tempérées, un faiseur d'alma- nachs peut très-bien annoncer dans le calendrier une averse pour n'importe quel jour, sans paraître violer une seule loi météo- rologique. En Angleterre, on devrait, semble-t-il, recourir aux vêtements imperméables pendant un laps moyen de 152 à 155 jours sur 365; dans les Pays-Bas pendant 170 jours, et à l'est de l'Irlande pendant '208. En d'autres termes, il pleut en Angle- terre 1 jour sur 2, tandis qu'en Sibérie il ne pleut que 1 jour sur 6, et dans le nord de la Syrie à peu près 1 jour sur 7. Tout élevé que paraisse ce calcul, il y a dans le Royaume-Uni cer- tains endroits il est dépassé de beaucoup, à Manchester,' par exemple. L'affreuse résidence que ce Manchester pour les gens qui aiment avant tout le beau temps et le soleil 1 Un som- bre et triste brouillard enveloppe la ville comme d*un crêpe 6 jours sur 7. La pluie y tombe teintée de vapeur de houille, et des rivières de suie liquide ruissellent par les rues. Il sufflt de proposer à un habitant de Londres une excursion dans cette métropole du coton pour provoquer une exclamation semblable

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i celle de Fuseli, se disposant à aller voir certains paysages hu- mides d'un confrère : « Donnez-moi mon manteau et mon para- pluie, disait-il, je vais voir les tableaux de M. Constable. »

Quelquefois, cependant, on a vu tomber des pluies d*un genre fort anormal. Vous figurez-vous, par exemple, la figure de notre cultivateur en s'apercevant que la pluie tombée sur sou domaine n'est autre que du sel fondu ? Peu soucieux de saler ou de mariner sa terre, le digne faomme jetterait les hauts eris. Quand de pareilles ondées de saumure ont lieu, on a trouvé les arbres tout couverts de cristaux blanchâtres , et rherbe était devenue tellement Acre que les bestiaux ne vou- laient plus y toucher que forcés par la faim . Bien qu'il ne pût être difficile d'attribuer à la mer l'origine de ces molécules salines, cependant un ouragan de chlorure de soude s'est abattu sur le comté de Suffolk, situé à vingt milles de distance de l'Océan.

Que dirait encore notre fermier d'une pluie de cendre ou de poussière? Dans les lies Shetland, il tomba un jour du ciel une poudre noire, qui barbouilla le visage des habitants, comme si c'eût été du noir de fumée. En mer, on a souvent vu tomber une pluie fine de sable ou de cendres, provenant dans le pre* mier cas d'un désert, et dans le second de quelque volcan, et ces matières ont couvert en couches tellement épaisses le pont des navires, qu'il a fallu les ramasser à la pelle comme de la oeige. Les pluies dépoussière qui désolent les Indes sont des phénomènes vraiment extraordinaires.

« Le ciel est clair, dit H. Baddeley, et l'on ne sent pas le moindre souffle; tout à coup on voit poindre à l'horizon, à peu d'élévation, une lourde masse nuageuse, qu'on est surpris de De pas avoir aperçue auparavant ; à peine quelques secondes se sont-elles écoulées , que le nuage a à moitié rempli l'hémi- sphère. Alors plus de temps à perdre, c'est une pluie de pous- sière : tout le monde se sauve à la débandade, et chacun rentre précipitamment au logis, afin d'éviter d'ôtre enveloppé par le tourbillon. > Ce n'est autre chose qu'une trombe chargée de poussière au lieu d'eau.

Notre cultivateur serait 9ans doute aussi peu charmé d'une pluie de soufre. On a vu des pluies jaunes dans certaines contrées de l'Europe ; et à en juger par la couleur de la substance ainsi

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que par sa facilité à s'enflammer (on vous dit encore qu'on en a fait des allumettes en Allemagne), de braves gens ont pré- sumé que ce devait être de bel et bon soufre. Cependant. on sait aujourd'hui que ces pluies sont d'une nature toute végétale. Le pollen des fleurs du pin, du bouleau, de l'aune et d'autres ar- bres est une matière légère et jaune, qui peut facilement être transportée par la brise et déposée sous la forme d'une pluie couleur gomme-guttc.

Les pluies rouges, qu'on a prises pour des pluies de sang, sont encore plus effrayantes. Figurez-vous, dans les temps de superstition, alors que chaque hameau avait sa sorcière, et le plus mince castel son spectre, figurez-vous la consternation du bon peuple en présence d'une pluie de sang venue du ciel ! En 1608, on remarqua de grosses gouttes rouges sur les murs de diverses maisons àÀix et dans les environs. Cet événement causa un tel émoi dans la population, que même les laboureurs, gaillards aux fibres solides pourtant, quittèrent les champs à toutes jambes, afin d'échapper à la pluie sanglante, convaincus que ce devait être un maléfice de Satan ou au moins d'un ses séides. Peiresc a observé avec soin ce merveilleux phéno- mène, et a découvert que la couleur de cette pluie était due à un papillon qui, en sortant de sa chrysalide, laissait couler une substance vermeille, d'un aspect peu différent de celui du sang. Dans d'autres cas de pluie rouge, on a attribué la teinte particu- lière du liquide à la présence d'infusoires, ou de cellules infini- ment petites de certaines plantes. La neige rouge des régions montueuses doit sa couleur à Vhdematococcus nivalis, et la neige verte au protococciis viridis.

Peut-être notre cultivateur aimerait-il mieux voir tomber du ciel une pluie de beurre 1 C'est, à ce qu'on assure, ce qui est ar- rivé dans plusieurs régions du Munster et du Leinster en l'année 1695-1696. Selon l'évoque de Cloyne, ce qui fit donner le nom de beurre à cette substance, c'est sa consistance et sa couleur ; elle était molle, gluante et d'un jaune foncé; elle tombait en morceaux, souvent aussi gros que le bout du doigt. Loin d'en être dégoûtés, les bestiaux la mangeaient dans les champs il s'en trouvait, et les gens de la campagne qui avaient des maux à la tête s'en frottaient la partie malade, disant ce re-

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pluie. 21

mède efficace. On a supposé que cette exsudation graisseuse était le résultat d'une action chimique qui s'était opérée dans Pair; mais il est bien plus que probable que c'était un produit animal analogue au miellat excrété par certains insectes.

Mais il a plu bien mieux que du beurre, à en croire certains rapports météorologiques ; écoutez plutôt ce passage d'une let- tre communiquée à la Société Royale en 1661 : « Samedi der- nier, le bruit a couru qu'il avait plu du blé à Tuchbrooke, vil- lage situé à 2 milles environ de Warwick. A cette nouvelle, des habitants de cette ville se sont rendus à l'endroit indiqué, ils ont vu une grande quantité de blé répandu sur les routes, dans les champs , sur les toits de l'église , du château et du prieuré, et dans l'âtre des cheminées dans l'intérieur des mai- sons. Arthur Mason, qui revient du Shropshire, rapporte qu'il est tombé pareille pluie dans plusieurs parties du comté. Remer- cions Dieu de ce bienfait miraculeux. » Mais la savante Société, moins prompte à s'enthousiasmer, arriva à celte conclusion, que le prétendu blé n'était autre chose que des graines de lierre apportées par des étourneaux.

La pluie, quoi qu'il en soit, prend un grand nombre de for- mes extraordinaires, qui sont de nature à tourmenter étrange- ment notre pauvre cultivateur. Quelle ne serait pas, par exem- ple, sa consternation si, tout à coup, ses terres étaient inon- dées d'une pluie de chrysalides ou de vermisseaux, comme celle qa on